Résumé
Rédigé dans la continuité de journées d’études consacrées aux arts et folklores organisées en 2012 par l’Université Paris III, cet article publié en 2014 nous a permis d’aborder un aspect important de la question du folklore afro-descendant mais finalement assez peu traité dans l’absolu: celui des transferts culturels internationaux qui existent entre le folklore traditionnel africain / africain-américain / afro-caribéen et le médium du film d’animation.
L’angle d’approche transnational adopté ici nous permet de nous pencher sur les figures d’animaux anthropomorphiques dont on retrouve une trace commune dans les récits oraux ouest-africains, antillais, africains-américains et dans le dessin animé américain du XXe siècle. Nous avons ainsi pu établir qu’il existait une correspondance formelle et substantielle entre les récits mettant en scène Leuk-le-lièvre (Sénégal / Afrique de l’Ouest), Compère Lapin (Antilles francophones), Brother / Brer Rabbit (Etats-Unis), et le célèbre Bugs Bunny, bonimenteur inégalé qui s’adapte et survit à toutes les situations aussi défavorables qu’elles soient.
Notre réflexion nous a également conduit à d l’évolution de ces personnages en établissant l’influence du contexte historique international sur ces derniers. S’ils sont en effet à l’origine issus de contes nés d’un « précipité historique » (selon l’expression de l’auteur martiniquais Raphaël Confiant) ayant pour cause la déportation de captifs africains lors de la traite négrière européenne, ces mêmes personnages d’animaux anthropomorphes perdent progressivement leur substance subversive originelle. La valeur de transmission pédagogique de leurs enseignements en situation hostile se délitera quant à elle au fur et mesure que l’industrie du cinéma américain grand public réinterprètera à sa manière ces Folktales, et délestera au passage leurs protagonistes de toute connotation afro-descendante.